TAFTA : LA FACE CACHÉE DE LA MONDIALISATION

Depuis une trentaine d’années, des accords, négociés par les
gouvernements successifs, tant au niveau européen qu’au
niveau mondial, ont entrepris de remettre en cause toutes les
avancées sociales et humaines acquises au fil des luttes
. Les
traités européens, les accords de l’OMC, les choix du FMI, ont
tous eu pour finalité de subordonner les droits fondamentaux
des peuples à la circulation des marchandises et à la finance.

Une ultime étape dans la destruction finale de ce modèle de
société
est sur le point d’être franchie. Avec le soutien de tous
les gouvernements de l’Union européenne, une grande
négociation est menée depuis le 8 juillet 2013 par la
commission européenne, avec les États-Unis.

Le mandat de négociation, soutenu par le gouvernement
français, est clair : il s’agit de confier au secteur privé la
définition des règles
en lui donnant la capacité de
remettre en
cause nos législations et règlementations dans tous
les domaines où les firmes privées considèreront que
ces normes constituent une entrave à leurs profits
 :
normes salariales, sociales, sanitaires, alimentaires,
environnementales…

Ces négociations ont pour objet la mise en place du Grand Marché Transatlantique (GMT) : TAFTA (Trans-Atlantic Free Trade Agreement), en français PTCI (Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement).

C ette affaire comporte, en face cachée, une
attaque sans précédent contre la
démocratie. Alors que les transnationales sont les
acteurs premiers et les premiers bénéficiaires de
cette étape décisive des dérégulations gigantesques
concernant la moitié du PIB mondial et le
tiers des échanges commerciaux, les
citoyens qui en seront les victimes essentielles
n’ont pas été consultés, mais au contraire
tenus dans la désinformation la plus totale. Le
mandat confié par les états de l’UE à la Commission
européenne est secret et n’a pu être connu
que grâce à des fuites. Son contenu officiel et celui
des tractations en cours sont interdits d’accès,
y compris aux parlementaires, représentants élus
de la Nation.

Attac France a adressé à ce sujet, le 13 février
dernier, une lettre ouverte à l’attention de
Mme Nicole Bricq, Ministre du Commerce
extérieur, lui demandant expressément de
faire la transparence sur les négociations du
Partenariat transatlantique
.

Mais le danger sans doute le plus grave concerne
le mécanisme d’arbitrage « investisseur-État »
inclus dans les négociations. Ce mécanisme
figure déjà dans les traités bilatéraux actuellement
en vigueur dans le monde (près de 3000) et il
permet à tout investisseur considérant que ses
profits peuvent être amoindris par une mesure
gouvernementale, de porte plainte contre ce
gouvernement, non pas devant une cour nationale,
un tribunal d’état, mais devant des tribunaux
d’arbitrage privés.
Il existe déjà plus de 1 800 de
ces tribunaux d’arbitrage dans le monde.
Composé de trois avocats et d’un arbitreprésident,
ils décident si l’État a lésé
l’investisseur. Si oui, ils fixent une compensation
qui peut dépasser le milliard de dollars, que l’État
doit sortir de la poche des contribuables. Et cet
arbitrage est à sens unique, l’État ne peut pas
porter plainte contre l’entreprise et il n’y a pas
d’appel possible.

Au travers de 512 conflits ouverts par des
multinationales contre des États, rien qu’en 2012
(dont plus du tiers a donné une compensation de
plus de 100 millions de dollars pour les sociétés),
on voit comment les sociétés européennes et
américaines ont utilisé ces procédures pour
contester des politiques d’énergie verte, des
législations anti-tabac, des interdictions de produits
chimiques dangereux, des restrictions
environnementales sur l’exploitation minière, des
politiques d’assurance santé ou des mesures
d’amélioration du sort de minorités.

Prenons l’exemple actuellement en cours, de
l’action d’une multinationale contre la protection
de l’environnement :

Sur la base de l’ALENA (accord entre les
États-Unis, le Canada et le Mexique), la société
américaine Lone Pine Ressources Inc. demande
250 millions de dollars américains de
compensation au Canada. Le « crime » du Canada :
la province canadienne du Québec a décrété un
moratoire sur l’extraction d’huile et gaz de schiste
en raison du risque environnemental de cette
technologie.

Dans cette affaire, un arbitrage rendu en faveur de
Lone Pine ferait jurisprudence. Et si TAFTA
entrait demain en vigueur, le gouvernement
français ne pourrait plus s’opposer à l’extraction
d’huile et gaz de schiste en France, sans s’exposer
à de très lourdes condamnations financières.
Il en va de même de l’interdiction, par mesure
sanitaire, d’importation en France de boeuf aux
hormones produit aux États-Unis, de même pour la
culture des OGM, etc...

Nous considérons donc, à Attac, que tout doit être
mis en oeuvre pour stopper la poursuite des
négociations
et empêcher que soit conclu
le « pacte » TAFTA qui scellerait la soumission
volontaire
des états de l’Union Européenne et des
États-Unis
au diktat des multinationales.

Christian Aubin
pour le Conseil d’Administration d’Attac78nord